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4 questions à Géraldine Broquin, Contrepoint Culture

Si vous êtes un lecteur régulier de communicant.info, vous connaissez sans doute déjà Géraldine. En effet, elle vous propose occasionnellement des articles et comptes-rendus. Mais elle est aussi la moitié du blog « Mon cher Watson ». Nous avions quelques questions à lui poser sur la relation entre marketing et médiation culturelle…

« Marketing et médiation culturelle ont en commun leur capacité à communiquer, de manière différente mais complémentaire. »

Communicant.info : Bonjour Géraldine, pouvez-vous nous présenter votre parcours ?
Géraldine Broquin : Bonjour et merci pour cette invitation ! Rétrospectivement, je dirais que mon parcours est guidé par deux choses qui me caractérisent : le goût des arts et de la culture, et celui de l’organisation. J’ai suivi des études littéraires à Grenoble puis un cursus universitaire en management de la culture, à Avignon. J’ai rapidement compris que ma place était dans la conception et la production de projets, aussi j’ai décidé de faire mes armes en agence d’événementiel : direction Paris ! J’ai énormément appris sur le métier tout en m’ouvrant au monde de l’entreprise, où d’ailleurs, la culture au sens large est un véritable sujet stratégique. Forte de cette expérience je suis finalement revenue à des projets dont les contenus culturels me motivaient plus et donnaient du sens à mon travail. Après être passée par quelques festivals comme Solidays, j’ai été chargée d’action culturelle et du développement des publics pour un réseau de médiathèques. Ces quelques années en collectivité territoriale m’ont été essentielles pour bien maitriser les politiques culturelles et leur mise en œuvre par l’action culturelle locale, le développement des partenariats, la communication.
Puis, en 2015, j’ai commencé à me poser la question de l’entrepreneuriat, et les possibilités qu’offraient les coopératives d’activité et d’emploi (CAE) dans le cadre des nouvelles lois sur l’ESS m’ont séduites. J’ai donc commencé à travailler en free-lance. En 2016, j’ai co-fondé avec Aurélie Romand le blog Mon cher Watson qui a été un tremplin pour la création en 2019 de l’agence Contrepoint culture. Basée à Annecy en Haute-Savoie, je développe aujourd’hui mon activité d’ingénierie culturelle en tant que consultante et conceptrice de projets. Et je me régale !

Communicant.info : Réconcilier marketing et médiation culturelle (lien vers article CR) est-ce vraiment possible ?
Géraldine Broquin : Si besoin est de réconcilier, c’est qu’il existe un conflit. Et à mon sens ce conflit n’est rien de moins qu’une guerre des mots ! Mettons marketing et médiation culturelle sur un divan, écoutons ce que chacun a à dire et tentons de déterminer ce qui les rassemble. La première chose à faire serait de définir un objectif commun allant dans le sens du projet d’établissement, comme le développement des publics par exemple. Quelle stratégie propose de déployer le service marketing pour atteindre cet objectif ? Rejoint-elle ou non celle du service médiation culturelle ? S’il existe de fortes dissensions, c’est peut-être qu’un ajustement dans la stratégie globale de l’établissement est à prévoir. Ensuite, il s’agit de travailler sur la gouvernance de l’organisation et sur une méthodologie transversale. Ce qui n’est pas simple, mais loin d’être impossible ! Et passionnant pour qui est prêt à se réinventer.
Je crois aussi que marketing et médiation culturelle ont en commun leur capacité à communiquer, de manière différente mais complémentaire. Le marketing travaille sur une promesse faite au public, dans le but de l’attirer vers l’objet culturel. Une fois sur place, l’expérience de visite, de représentation, de lecture, de découverte, etc. conduite par les équipes de médiation se doit d’être à la hauteur de cette promesse. A l’inverse, un projet culturel de qualité mais insuffisamment mis en valeur auprès des publics cibles ne trouvera pas l’écho mérité, mettant à mal la motivation des équipes et la capacité économique de l’établissement. Travailler le fond et la forme de manière conjointe sonne donc comme une évidence pour mettre en place une relation positive et durable avec un public potentiellement prescripteur.

« S’enrichir d’univers différents dans l’objectif de faire passer un message ou une émotion »

Communicant.info : Le dénominateur commun dans tout cela, n’est-ce pas justement le public ?
Géraldine Broquin : Le public est en effet le socle de toute action de communication et de médiation culturelle. Sans public, l’œuvre existe-t-elle encore ? Il me semble qu’un déplacement s’est effectué avec l’arrivée du marketing dans les institutions culturelles : l’objet culturel ou l’œuvre était au centre de tout. Et le public gravitait autour, cherchant à l’atteindre. Aujourd’hui, le public concentre toutes les attentions : le discours et l’accessibilité sont travaillés pour que les objets culturels puissent potentiellement concerner chacun. Les idées de démocratisation de la culture (terme que je ne n’aime pas tellement) puis d’inclusion des droits culturels aux droits des personnes y sont aussi certainement pour quelque chose. La personne humaine devient-elle plus sacrée que l’art ? J’imagine que ces réflexions peuvent soulever les passions et engager quelques heures de débats ! 

Geraldine-Broquin-marketing-mediation-culturelle
Geraldine Broquin : « marketing et médiation culturelle ont en commun leur capacité à communiquer, de manière différente mais complémentaire ».

Communicant.info : Au final, l’idée n’est-elle pas d’écrire une histoire avec le public ?
Géraldine Broquin : Cette idée d’écrire une histoire appelle automatiquement aux techniques du storytelling dont le marketing use de manière évidente… mais aussi la médiation culturelle !
Au cours d’une formation donnée à des médiateurs et guides-conférenciers, nous avons mis en avant l’utilisation – souvent sans que cela soit conscient – du storytelling dans leurs parcours de visite. Puis nous avons utilisé des techniques narratives pour construire de nouveaux parcours et cela fonctionnait à merveille ! Nous avons donc dédramatisé cette opposition culture/marketing pour s’enrichir d’univers différents dans l’objectif de faire passer un message ou une émotion. Mon constat est que les médiateurs sont de merveilleux communicants, des narrateurs impliqués dans cette histoire qui s’écrit entre le public et l’œuvre.

Les articles de Géraldine pour communicant.info
Le marketing culturel, vous en faites déjà (compte rendu)
. Promouvoir sa structure par la médiation culturelle
. Structures culturelles : pourquoi le storytelling est fait pour vous ?

Retrouvez aussi les articles de Géraldine Broquin (Médiation culturelle et Storytelling) dans le livre blanc « le Marketing Culturel de A à Z » conçu en partenariat avec communicant.info !

Auteur
Je m’appelle Cyril Leclerc. Je propose, en tant qu’indépendant, du conseil et de l’accompagnement en communication dans les domaines culturels et artistiques. Diplômé en Histoire de l’Art et en Ingénierie culturelle, je me suis, au fil de mon parcours, spécialisé dans la communication culturelle, jusqu’à en faire mon métier. J’ai notamment été pendant sept années, chargé de la communication culturelle à l’Abbaye aux Dames, la cité musicale (Saintes – France). Je m’intéresse particulièrement à la façon dont on peut mettre les outils marketing au service de projets culturels et comment la communication peut enrichir un projet culturel, lui apporter du sens…