Culture soutenableDéveloppement et stratégie

Un guide pour la mise en œuvre de la RSO dans le spectacle vivant…

RSE / RSO, Développement Durable… Autant de notions qui peuvent encore paraître obscures pour les acteurs culturels. Ce sont, pourtant, des leviers très utiles, pour toute organisation culturelle qui souhaite intégrer les enjeux environnementaux dans son plan d’action. Artis-Le Lab, en partenariat avec Opale a ainsi mis en place un guide pour mettre en place la Responsabilité Sociétale des Organisations dans le spectacle vivant. Nous en avions discuté avec Marie Gérard, alors chargée de mission à Artis-Le Lab

« Aborder de manière globale les différents enjeux auxquels les organisations du travail sont confrontées… »

Communicant.info : pouvez-vous nous expliquer quelles sont les motivations qui ont amenées la création de ce « Guide sur la mise en œuvre de la RSO dans le spectacle vivant » ?
Marie Girard : Les années récentes sont marquées par une prise de conscience de plus en plus forte des enjeux environnementaux au sein de la société. Le spectacle vivant n’y échappe pas et ces enjeux sont présents depuis quelques années dans les débats qui traversent le secteur. Plusieurs initiatives de terrain naissent pour prendre en compte ces enjeux dans les pratiques de travail. ARTIS-Le Lab a souhaité participer à cette dynamique par le biais de sa mission d’information et de ressource : en créant ce « Guide sur la mise en œuvre de la RSO dans le spectacle vivant », nous souhaitons faire connaître la RSO auprès des professionnels du spectacle car il s’agit d’un des leviers d’actions possibles pour prendre en compte les enjeux environnementaux. Mais ce levier permet également d’intégrer d’autres enjeux et c’est ce qui rend la démarche intéressante et pertinente. Pour réaliser ce guide, nous nous sommes associés à Opale (centre ressource Culture & Economie Sociale et Solidaire) et à Alterculture (structure d’accompagnement à la mise en œuvre de la RSO dans le secteur culturel).

C.I : Tout d’abord pouvez-vous nous dire ce qu’est la RSO ? Y-a-t-il une différence avec la RSE ?
MG : La RSO est un acronyme qui signifie « Responsabilité Sociétale des Organisations ».
Cette dernière désigne la responsabilité des organisations vis-à-vis des effets qu’elles exercent sur la société. Il s’agit d’une démarche globale, qui associe des outils de travail concrets à une éthique, voire une philosophie de pensée et d’action. La RSO est souvent vue comme une façon de répondre aux enjeux environnementaux. Or si elle cherche effectivement à y répondre, elle s’intéresse également à d’autres problématiques de société. C’est tout l’intérêt de cette démarche : aborder de manière globale les différents enjeux auxquels les organisations du travail sont confrontées. La Responsabilité Sociétale des Organisations s’est construite à partir des enjeux du développement durable (il serait plus juste aujourd’hui de parler de « développement soutenable ») : l’économie, le social, l’environnement. La RSO s’intéresse donc aux impacts des organisations sur l’environnement, à la qualité de vie au travail, à la contribution de leurs modèles économiques à la société… Au total, sept thèmes de travail composent la RSO. En ce qui concerne la RSE (Responsabilité Sociétale des Entreprises), il n’y a pas de différence avec la RSO : cette dernière élargit le terme de RSE à l’ensemble des acteurs économiques et sociaux. Mais quel que soit le terme, la démarche est la même. Le terme de RSO permet de montrer que cette dernière s’adresse à tout le monde.

« Renoncer à l’idée de croissance et de production illimitées… »

C.I : RSE et RSO sont régulièrement associés à une logique de « croissance verte »… Qu’en pensez-vous ? Bien être humain et soutenabilité environnementale sont-ils compatibles avec la
croissance ?
MG : La RSO s’inscrit effectivement dans la continuité des principes du développement durable, qui envisage la croissance (la notion de développement sous-tend l’idée d’une continuité de la croissance des productions de biens) dans un idéal de soutenabilité. Dans les faits, il me semble que les sujets dont relève la RSO, d’autant plus appliquée à un secteur comme le spectacle vivant – en proie à des problématiques de création, de diffusion – questionnent également cette croissance et ses limites. Lorsqu’on parle de qualité de vie au travail, de développement local, de droits culturels, de réduction de l’empreinte carbone, d’une utilisation raisonnée et durable des ressources, cela induit de renoncer à l’idée de croissance et de production illimitées.

C.I : Le terme de RSO recouvre une démarche globale incluant notamment de nouvelles formes de gouvernance, pouvez-vous nous expliquer cela ? 
MG : L’un des sept thèmes de travail de la RSO concerne la gouvernance des organisations. Plus qu’un thème parmi d’autres, il s’agit sans doute de l’élément qui constitue la base du travail en direction des six autres thèmes. Par gouvernance, il faut entendre l’articulation entre les différentes entités qui composent une organisation : instances dirigeantes, équipe salariée. Mais cela concerne également la relation entre l’organisation et son environnement : on parle alors des « parties prenantes ». Les parties prenantes sont entendues comme étant l’ensemble des acteurs et des partenaires composant l’écosystème de l’organisation. Elles affectent ou sont affectées par les activités, les réalisations, les services ou les décisions de l’organisation. Afin d’engager une démarche de RSO, il est nécessaire de faire travailler ensemble les différentes entités d’une organisation, internes comme externes. Cela permet à chacune de connaitre et de s’approprier la démarche, d’être rendu actrice du processus et non de le subir. Enfin, cela donne plus d’impacts aux changements provoqués par la RSO car ces derniers agissent en profondeur sur les pratiques de travail. Cette nouvelle forme de gouvernance favorise la coopération et permet d’aborder les autres thèmes de la RSO en croisant différents points de vue.

« Un prisme qui permet de repenser les choses sous un angle nouveau… »

C.I : Aux structures qui pourraient voir la mise en place d’une démarche RSO comme une contrainte, que répondez-vous ?
MG : J’invite les professionnels et les structures qui se questionnent sur la RSO à considérer cette démarche non pas comme un plan d’actions contraignant qui vient s’ajouter à la charge de travail des équipes, mais comme un prisme qui permet de repenser les choses sous un angle nouveau. S’engager dans une démarche RSO, c’est donner à sa structure l’opportunité de se montrer résiliente face aux crises qui traversent et traverseront le secteur, c’est remettre au centre des préoccupations le bien être des salariés, les caractéristiques de la gouvernance de la structure, c’est questionner les habitudes de travail, les relations entre membres de la structure… Mener une telle démarche c’est emprunter une voie parallèle qui permet de repenser nos pratiques de manière plus soutenable, humaine et vertueuse. La démarche RSO requiert une attitude exigeante, une analyse fine des pratiques professionnelles, en même temps il s’agit d’un outil formidable à disposition des professionnels.

C.I : Enfin, mettre en place une stratégie de RSO est-elle possible à n’importe quelle échelle ? Ou est-ce plutôt un levier réservé à une organisation de taille moyenne ?
MG : La RSO concerne les structures de toutes tailles, de la plus petite avec un seul salarié ou même uniquement des bénévoles, à des structures plus importantes. En réalité, la stratégie RSO porte sur la structure, sur les personnes qui travaillent et font partie de cette structure, mais aussi sur tout l’écosystème qui entoure la structure. Ainsi, même si une organisation de petite taille s’initie à la RSO, cela va concerner in fine un nombre de parties prenantes important. C’est une démarche qui s’adresse donc à tous, elle s’adapte à toute organisation, quelles que soient ses caractéristiques.

Auteur
Je m’appelle Cyril Leclerc. Je propose, en tant qu’indépendant, du conseil et de l’accompagnement en communication dans les domaines culturels et artistiques. Diplômé en Histoire de l’Art et en Ingénierie culturelle, je me suis, au fil de mon parcours, spécialisé dans la communication culturelle, jusqu’à en faire mon métier. J’ai notamment été pendant sept années, chargé de la communication culturelle à l’Abbaye aux Dames, la cité musicale (Saintes – France). Je m’intéresse particulièrement à la façon dont on peut mettre les outils marketing au service de projets culturels et comment la communication peut enrichir un projet culturel, lui apporter du sens…